La RDC complète sa première enquête nationale sur la consommation des antimicrobiens
« La résistance aux antimicrobiens (RAM) a terriblement augmenté ces dernières années à travers le monde. Elle est considérée comme l’un des plus grands et plus urgents risques pour la santé publique mondiale. De ce fait, et ce, conformément à la résolution de l’Assemblée mondiale de la santé [sur la résistance aux antimicrobiens (RAM)], la République démocratique du Congo (RDC) a élaboré un plan national contre la résistance aux antimicrobiens. »
C’est en ces termes que le Ministre de la Santé de la RDC, Dr. Eteni Longondo, a évoqué la RAM lors de la présentation des résultats d’une enquête sur la consommation des antimicrobiens en RDC le 4 décembre 2020 (source : la Radio-Télévision Nationale Congolaise (RTNC)).
En effet, la RAM réduit l’efficacité des antimicrobiens et n’épargne aucun secteur, que ce soit celui de la santé humaine, animale, environnementale ou liée à l’agriculture. Son fardeau est encore plus important pour les pays à revenu faible ou intermédiaire en raison de contraintes multiples, comprenant la disponibilité de fonds ou de données pour faire face à ce défi.
Dans le cadre des efforts pour contenir la RAM, la RDC décida, en priorité, de mettre en place un plan d’action national de suivi de la consommation et d’optimisation de l’utilisation des antimicrobiens. De ce fait, un outil sous la forme d’une enquête fut créé afin d’obtenir des données sur la consommation des antibiotiques et leur utilisation afin d’être exploitées pour la sensibilisation et permettre aux professionnels de la santé, des consommateurs et des décideurs politiques d’avoir les informations pour répondre aux problèmes liés à la RAM. Afin de faciliter le déroulement de l’enquête, le Programme des Médicaments, Technologies et Services Pharmaceutiques (MTaPS) a travaillé avec la Direction de la Pharmacie et du Médicament (DPM), en collaboration avec l’OMS, afin de former les enquêteurs et les superviseurs sur la méthodologie de l’enquête, y compris la maîtrise de la classification « Anatomical Therapeutic Chemical/Daily Defined Dose (ATC/DDD) », la surveillance des antimicrobiens et la collecte de données.
Débutée en août 2020, l’enquête s’est déroulée pendant deux mois dans les trois provinces qui sont les points d’entrée pour les médicaments importés ou qui abritent les sites de fabrication des médicaments produits localement, à savoir le Haut-Katanga, Kinshasa et le Nord-Kivu. En raison de défis liés à la disponibilité des données fiables, l’enquête n’a pris en compte que les antibactériens distribués au cours des années 2018 et 2019 dans les établissements de vente en gros du secteur privé, les centrales de distribution régionales de médicaments, les industries locales de production des médicaments, ainsi que les agences des Nations-Unies et les ONG locales et internationales.
L’enquête a permis de montrer plusieurs points positifs. Utilisant la classification AWaRE (Access Watch, and Reserve) de l’OMS, un outil conçu pour soutenir la gestion rationnelle des antimicrobiens, l’enquête a révélé que les antibiotiques de la catégorie Access, la catégorie offrant la meilleure valeur thérapeutique tout en minimisant le potentiel pour la résistance, représentaient 71% en 2018 et 70% en 2019 de l’ensemble des antibiotiques dans le pays. Ce chiffre est très encourageant étant donné que la norme de l’OMS est de 60% pour cette catégorie. Garder l’utilisation des médicaments du groupe Access au-dessus de 60% pour le traitement des maladies infectieuses aide à promouvoir l’utilisation rationnelle des antimicrobiens étant donné que les groupes Watch et Reserve sont réservés au cas où les médicaments du groupe Access ne marchent pas ou ne peuvent être utilisés.
Les données collectées sur la consommation des antimicrobiens a permis au pays d’être admis dans la plateforme GLASS. Cette étape est importante pour le pays car elle lui permet d’accroître son niveau de capacité, en utilisant le cadre de l’OMS, pour la lutte contre la RAM, tout en soutenant les efforts mondiaux de surveillance.
« Nous avons voulu savoir quelle est la quantité des antimicrobiens consommés dans le pays. Nous voulons que les antibiotiques de dernier recours soient protégés. Puisqu’avec la résistance aux antimicrobiens, s’il n’y a pas de protection pour les antibiotiques et que l’utilisation est abusive, nous risquons de nous retrouver dans une situation de résistance totale. » – Dr. Donatien Kabamb Kabey, Directeur de la DPM, lors d’une interview accordée à la RTNC en marge de la cérémonie de présentation des résultats
MTaPS va continuer à soutenir la DPM, en suivant les recommandations de l’OMS, pour permettre la tenue annuelle de l’enquête afin d’identifier les tendances de l’utilisation des antimicrobiens en RDC. Avec cette tendance et des analyses quantitatives, le pays sera capable de déterminer quels sont les secteurs qui demandent de l’attention pour des mesures correctrices. De plus, le programme va également offrir son expertise pour la mise en œuvre du plan d’action contre la RAM afin d’avoir une meilleure gestion des antimicrobiens.